Scandale du Mediator
Publié le mardi 26 décembre 2023, 10h07 - modifié le 10/01/24 - Santé publique - Lien permanent
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Le groupe Servier et les six entreprises qu'il représente a été condamné par la Cour d'Appel de Paris, le mercredi 20 décembre 2023, a versé des indemnités aux plaignants, à la Sécurité Sociale et au Ministère de la Justice. Certes, la décision était attendue mais le groupe va se pourvoir en cassation. Justice peut-elle être rendue dans de telles conditions ? La question se pose. Comparons le traitement accordé au fondateur décédé en 2014 et à son entreprise avec ce qui a été opposé aux manifestants de Sainte Soline, aux gilets jaunes, aux jeunes émeutiers, aux lycéens par la macronie.
Librement tiré de l'AFP
Mis sur le marché en 1976 comme adjuvant aux traitements antidiabétiques, le Mediator, produit par les laboratoires Server a souvent été prescrit indûment comme coupe-faim et a causé de graves lésions cardiovasculaires, pouvant s'avérer mortelles, chez des milliers de patients. En 2013, une expertise judiciaire, avait évalué entre 1 300 et 1 800 le nombre de morts de maladie cardiaque, à long terme, imputable au Mediator.
Après 13 ans de bataille, la cour d'appel de Paris a lourdement condamné le groupe pharmaceutique mercredi 20 décembre.
Le deuxième laboratoire médical français a été reconnu coupable de tous les délits qui lui étaient reprochés, y compris les délits d'escroquerie et d'obtention indue de mise sur le marché pour lequel il avait été relaxé en première instance.
C'est une immense victoire pour les victimes que je représente et que je défends depuis la première plainte de novembre 2010 a commenté CharlesèJoseph Oudin, l'un des avocats des plus de 7 000 parties civiles.
"Tromperie aggravée" et "homicides et blessures involontaires"
La cour d'appel a également confirmé la culpabilité de Servier pour les délits de tromperie aggravée et homicides et blessures involontaires. Les six sociétés composant le groupe devront verser une amende totale de quelque 9 millions d'euros. S'agissant des caisses d'assurance maladie et des mutuelles, la cour a condamné Servier à leur verser la somme de plus de 415 millions d'euros au titre du préjudice financier, plus d'un million d'euros au titre du préjudice de désorganisation et plus de 5 millions d'euros en frais de procédure.
La cour n'a pas suivi les réquisitions du parquet qui demandait la confiscation des bénéfices de Servier liés au Mediator, soit 182 millions d'euros, arguant que cela risquait de mettre en péril le groupe. Nous voyons bien ici comme les juges utilisent les faits à l'avantage des puissants. Ont-ils toujours le même niveau de prévenance lorsqu'il s'agit de condamner des pauvres, des migrants, des habitants des périphéries ?
5 000 autres dossiers en cours d'instruction
Lors de la présentation du jugement le président de la cour, Olivier Géron, a souligné que le laboratoire avait privilégié son intérêt financier sur l'intérêt des patients. Le Mediator a été prescrit à quelque cinq millions de personnes. Il y a eu une politique systématique de dissimulation vis-à-vis des médecins qui s'interrogeaient au sujet du Mediator, a affirmé M. Géron.
Quelque 5 000 autres dossiers pour homicides ou blessures involontaires sont toujours à l'instruction au parquet de Paris, ouvrant la voie à un probable second procès Mediator dans les prochaines années.
Le médicament avait été retiré du marché en Espagne et en Italie en 2003-2004. En 2007, la docteur Irène Frachon, pneumologue à Brest, entamait des recherches sur les effets dangereux du médicament et révélait l'ampleur du scandale. Le Médiator ne sera retiré du marché en France qu'en 2009. La lanceuse d'alerte relatera en 2010 son enquête et son difficile combat dans le livre Mediator 150 mg, combien de morts ?